Page:Pellissier - Le Mouvement littéraire contemporain, 1908.djvu/240

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plus vigoureux et plus puissants, elle n’a aucun poète plus original ; et, même quand cette originalité choque notre goût, nous y trouvons encore un charme insinuant et subtil.


Entre les volumes de vers qu’a laissés Georges Rodenbach, on doit mentionner particulièrement le Règne du silence. Ses dernières œuvres trahissent la recherche, le procédé ; elles ont quelque chose de vieillot en même temps et de puéril. La note de Rodenbach est toujours la même. Affecté dès le début, il finit par s’évertuer sans grâce à des mièvreries non moins fades qu’alambiquées, confites en je ne sais quelle religiosité douceâtre et blafarde. Mais ce qui le protégera sans doute contre l’oubli, c’est que, si sa note ne varie pas, elle lui appartient bien en propre. Âme lasse et valétudinaire, il fut le poète du silence, des demi-teintes et de la pénombre, le poète de tout ce qui se fane, passe, tombe en désuétude. Il nous donne l’impression très pénétrante des choses natales qui avaient modelé son être, paysages décolorés et dolents, brumeux horizons, mornes canaux, cloches discrètes des béguinages, cités assoupies qu’enveloppe une atmosphère de tristesse lénitive et dans lesquelles la vie présente semble n’être que le reflet d’un passé lointain.


Il y a la Belgique de Georges Rodenbach, avec ses langueurs et sa quiétude somnolente ; il y en a une