Page:Pellissier - Voltaire philosophe, 1908.djvu/294

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
279
POLITIQUE

d’être témoin. Les Français arrivent tard à tout, mais enfin ils arrivent. La lumière s’est tellement répandue de proche en proche, qu’on éclatera à la première occasion, et alors ce sera un beau tapage. Les jeunes gens sont bien heureux ; ils verront de belles choses » (2 avr. 1764). Peut-être Voltaire, si belles que ces choses lui semblent à distance, ne les aurait pas vues sans épouvante. En tout cas il aurait approuvé la plupart des réformes que firent les hommes de 89 ; et lui-même n’en fut-il pas au surplus le premier initiateur ?

Son action réformatrice s’étendit à presque tous les domaines de la vie civile : indiquons-en, avec autant de précision que possible, les divers objets.

Pour ce qui est de l’éducation, s’il n’a tracé nulle part un plan suivi, deux ou trois de ses opuscules s’y rapportent et plusieurs de ses lettres.

À un négociant d’Abbeville qui lui demande conseil sur la manière d’élever ses enfants, il ne répond que quelques lignes en s’accusant d’incompétence, mais non sans critiquer la méthode des collèges, où les mêmes matières sont enseignées aux esprits les plus différents[1]. Ailleurs, il se plaint que les jeunes gens apprennent des choses inutiles, que, s’adressant à leur mémoire, on néglige leur intelligence : balbutier du latin pendant sept ans et ne pas savoir seulement que François Ier a été fait prisonnier à Pavie, étudier une physique fondée sur des systèmes que démentent l’expérience et les mathématiques, se mettre dans la tête une philosophie consistant en ridicules sophismes et en formules vides, c’est à quoi le collège borne

  1. Lettre à M. Collenot, 21 janv. 1765.