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VOLTAIRE PHILOSOPHE

horreur, il voudrait qu’on permît aux soldats de prendre femme, il demande qu’on exempte d’impôt les jeunes ménages en répartissant leurs taxes sur les célibataires[1].

Autant le mariage est utile à la société, autant l’adultère lui est nuisible. Il faut le flétrir chez l’homme tout aussi bien que chez la femme. Dans un mémoire à la junte de Portugal, « une comtesse d’Arcira », trompée vingt fois par son mari avec la connivence des lois, trouve fort mauvais que, l’ayant une seule fois imité, on veuille la dépouiller de tous ses biens et la jeter dans un cachot. « En fait de justice, lui fait dire Voltaire, les choses doivent être égales » (Dict. phil., Adultère, XXVI, 108, sqq.). Et non seulement l’adultère de l’homme n’a rien à craindre des tribunaux, mais il trouve grâce aux yeux du monde. Le monde chasse ignominieusement un tricheur, ne serait-ce que pour deux pistoles, et il excuse, il protège ceux qui commettent le plus impardonnable de tous les crimes, le plus funeste au genre humain[2], ceux qui ruinent le fondement même de la société.

Quelque respect que mérite le mariage, Voltaire n’en fait point, comme les théologiens, « le signe visible d’une chose invisible » : institution sociale et non sacrement, le mariage doit être révocable. Dans l’article Adultère du Dictionnaire philosophique, un magistrat, dont la femme a été débauchée par un prêtre, et qui a dû la chasser de sa maison, représente aux autorités ecclésiastiques comme quoi l’Église,

  1. Dict. phil., Mariage, XXX, 127, 128.
  2. Prix de la Justice et de l’Humanité, L, 266.