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Page:Pelloutier - Histoire des bourses du travail, 1902.djvu/30

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xix
fernand pelloutier

on eût dit d’un vieillard. La vie semblait s’être réfugiée dans sa tête, qui avait pris une ampleur exagérée. Il réussit cependant, à force de volonté, à assister à ce Congrès où, pendant quatre jours, il prit une part active à la discussion de toutes les questions à l’ordre du jour et eut à se défendre encore contre les attaques d’ennemis sans cesse terrassés, mais toujours renaissants.

Ce fut son dernier effort. Au lendemain du Congrès, il s’alita pour ne plus se relever. Pendant près de six mois, il endura un véritable martyre, crachant le sang presque sans interruption, étouffant sans cesse, n’obtenant quelques instants de répit et de soulagement qu’à l’aide de piqûres répétées de morphine. Pourtant, jusqu’au dernier moment, il ne cessa de s’intéresser à la Fédération, guidant son frère qui s’occupait de la correspondance et le remplaçait pour tout ce qui concernait le secrétariat. Quelques semaines avant de mourir, il s’était fait transporter dans son cabinet de travail, où un lit avait été dressé devant sa chère bibliothèque et où il éprouva sa dernière joie, une véritable joie d’enfant, de se retrouver au milieu de ses livres. Le 13 mars, à onze heures du matin, il expirait après une agonie qui durait depuis minuit et pendant laquelle il ne reprit pas une seule fois connaissance.

Il ne nous reste plus qu’à affirmer à cette place la parfaite communion d’idées et l’indestructible solidarité qui unissaient notre courageux ami au parti de la Révolution sociale, au mouvement libertaire inter-