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besoin de provisions, de chevaux, de canots ou de guides. En échange, ils abandonnent aux indigènes leurs vieux habits. De là une étrange collection de manteaux, de pantalons, de chapeaux, de chaussures, que ceux-ci se mettent d’ailleurs peu en peine d’adapter, soit au sexe, soit à l’âge.

« Deux Indiens, grands et robustes, passent fièrement devant nous. Apparemment, ils sont bien convaincus du mérite qu’ajoutent à leur personne leurs nouvelles acquisitions. L’un porte un pantalon à l’envers, l’autre une jaquette trop courte, avec un pantalon collant, dont les solutions de continuité accusent l’absence de chemise. Leur tête est couverte d’une coiffe à dentelle. L’un a un soulier, l’autre en a deux.

» Quelques sauvages se pavanent dans un complet de charretier ; d’autres, dans un mélange d’habits de matelot, d’ouvrier et d’avocat, le tout arrangé suivant leur fantaisie. Certains ne possèdent qu’un seul article. J’ai vu un vieil Indien faire parade d’une paire de bottes : c’était, ce semble, tout ce que contenait sa garde-robe.

» Les femmes portent de longues robes de calicot que, par goût ou par négligence, elles arrosent d’huile de saumon. Si elles sont assez riches, elles y ajoutent une veste, un gilet de flanelle, ou, le nec plus ultra de l’élégance, un grand pardessus d’homme ».[1]

Le spectacle divertit un instant notre missionnaire, mais ne peut lui faire oublier la misère morale de ces pauvres gens.

« Chez la plupart, l’idolâtrie va jusqu’à adorer les plus vils animaux. Quelques-uns ne reculent pas devant les

  1. Lettre au P. Van de Velde. — Fort Wallawalla, 18 juin 1846.