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espace de quarante à cinquante pieds carrés. Les malades n’ont à respirer qu’une atmosphère corrompue et empestée. J’ai visité ces réduits et, chaque fois, j’en ai eu mal au cœur et à l’estomac. C’est vraiment un miracle que des passagers échappent avec la vie d’un trou si horrible et si malsain.

» Le transport des émigrants, tel qu’il se pratique aujourd’hui sur le Mississipi, est un crime impardonnable dans un pays civilisé. Une spéculation sordide en est seule la cause. Quel que soit leur nombre, les étrangers sont, les uns après les autres, reçus dans le bateau. Le capitaine regarde s’accumuler sous ses yeux l’argent du passage, et ne semble jamais réfléchir au sacrifice de vies humaines que doit entraîner pareil encombrement… C’est ainsi que des familles entières sont détruites, et que des milliers d’enfants deviennent orphelins dans un pays étranger »[1].

Un jour débarque à Saint-Louis une famille d’émigrés flamands, composée du père, de la mère et de neuf enfants. Les parents, ainsi que quatre enfants, sont tombés malades sur le bateau. Le maire les fait transporter à l’hôpital protestant. Presque aussitôt, le père meurt ; la mère ne lui survit que quelques jours ; puis c’est le tour d’une fillette de sept ans.

Averti de cette détresse, le P. De Smet fait aussitôt recueillir les huit orphelins, dont l’aîné a dix-sept ans, le plus jeune, huit mois seulement. « Peut-être, écrit-il à son frère, sera-ce une consolation pour leurs amis de Belgique de savoir que j’ai placé les trois petites filles chez les Sœurs de Charité, et les deux petits garçons

  1. Lettre à son frère Charles. — Saint-Louis, décembre 1849.