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Au fort Wallawalla, il rencontra les otages pris, deux mois auparavant, par le colonel Wright.

« Les croyant en danger de se pervertir, raconte le P. Vercruysse, il demande qu’ils puissent l’accompagner dans leur pays.

— Impossible, répond le colonel. Il me faudrait l’autorisation expresse du général Harney.

— Eh bien ! dit le Père, je suis sûr que le général ne vous reprochera pas d’avoir acquiescé à ma demande. Je connais les Spokanes, les Cœurs-d’Alène et les Kalispels. Ce sont mes enfants. Je réponds de leur fidélité sur ma tête, et, si le général me la demande, je la lui apporterai.

» Dès lors, le colonel ne s’oppose plus au départ des otages, et ceux-ci s’en vont avec leur Père, joyeux comme les âmes sortant des Limbes ».[1]

Cet arrangement fournit au P. De Smet des compagnons et des guides, mais surtout lui assure bon accueil auprès des tribus. Lorsque, le 21 novembre, il arrive chez les Cœurs-d’Alène, il est reçu avec enthousiasme, comme l’ami, le père, le libérateur des Indiens.

Le missionnaire revoit, après douze ans, ceux qu’il a jadis engendrés à la foi. Depuis lors, la réduction s’est développée. Elle possède une belle église, des habitations commodes, un moulin, des ateliers, de riches pâturages, des champs d’une fertilité prodigieuse. Mais cette prospérité même n’est pas sans danger. Déjà les Blancs convoitent les terres de la mission. La pensée de devoir bientôt quitter les tombeaux des aïeux jette la tribu dans un morne abattement.

  1. Lettre au P. Broeckaert. — 13 juin 1859.