Elle n’osa pas l’avirer hors de son chemin et elle fut obligée d’entendre des paroles abominables et des menaces. Elle céderait ou il ameuterait contre elle toute la jeunesse du pays… et qui la défendrait maintenant que son frère était estropié ?…
Aussitôt qu’il n’y eut personne en vue, elle le chassa à coups de pierres.
Alors, à partir de ce jour, il prépara sa vengeance.
Il lui sembla que Gédéon serait un outil parfait pour cette mauvaise besogne et il se mit à le préparer, à le fourbir, à l’affûter comme une serpe d’élagueur.
Le jeune homme, comme lui-même d’ailleurs, était gagé jusqu’au premier mars. Son marché, à lui Boiseriot, était conclu pour une nouvelle période, mais Gédéon n’avait pas pu s’entendre encore avec le patron et il était à croire qu’il sortirait dans quelques semaines. Il demandait vingt écus d’augmentation et Michel n’était pas disposé à lui accorder tant que cela. Gédéon n’était ni très adroit ni, surtout, très docile. Il tenait bien compte des commandements qu’on lui faisait, mais jamais tout de suite, et son premier mouvement était de les prendre à rebours. De plus, sans être paresseux, il perdait du temps sur son chemin, sa jeunesse trouvant amusement partout.
Boiseriot commença donc à l’échauffer contre Michel. Il s’y prit de loin pour que l’autre ne le vît pas venir.
Les jours où le patron grommelait à cause d’un travail mal fait, il disait au jeune valet :