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LES LUNETTES DE GRAND’MAMAN.

Ce caprice, tout nouveau, laissa d’abord ma bonne stupéfaite. Je l’observais du coin de l’œil. En la voyant hésiter, je redoublai mes cris.

Se souvenant alors des recommandations de mon père :

« Vous l’aurez, vous l’aurez ; attendez seulement cinq minutes, » s’écria Jenny.

Elle courut à la cuisine.

Ah ! la bonne affaire ! C’était donc vrai ? Je pouvais avoir des caprices toute la journée, à présent.

Je ne m’en fis pas faute, quoique celui de ce matin-là me réussit assez mal, car voici ce qui arriva.

Lorsque Jenny revint avec la tasse de chocolat brûlant, je m’emparai du tout, refusant avec obstination de la laisser tenir quelque chose. Elle eut beau me dire : « Ça va tomber, monsieur Maurice, il arrivera un malheur, » je résistai et commençai à déjeuner. Mais, à la seconde cuillerée, un mouvement que je fis renversa l’équilibre de ma tasse. Elle pencha. Sentant mes doigts inondés et brûlés, je les retirai vivement… N’étant plus soutenue, la tasse acheva de se renverser, et le reste du chocolat, encore très chaud, glissa dans mon lit, me brûlant un peu partout.

Je criai avec plusieurs bonnes raisons pour le faire, cette fois.