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LES LUNETTES DE GRAND’MAMAN.

J’entendis le bruit de la porte qui s’ouvrait, puis celui du rouet heurtant le chambranle, et des allées et venues dont je ne me rendais pas bien compte.

Cela dura un quart d’heure environ.

Lorsque tout fut devenu silencieux autour d’elle, ma grand’mère poussa un gros soupir.

« Allons, mes chères lunettes, dit-elle à demi voix, venez à mon secours. »

Cette invocation fut pour moi un trait de lumière… Ses lunettes ?… Voilà la fée à son service. Étais-je nigaud de n’y avoir pas songé ?… C’était donc de là que lui venait cette puissance mystérieuse qui l’aidait à lire dans ma pensée et à deviner toutes mes sottises ?…

Je me levai tout doucement, et, grimpant sans bruit le long de ma porte dont les bandes entrecroisées me servaient d’échelons, j’arrivai à la hauteur de l’œil-de-bœuf, d’où mon regard pouvait facilement plonger dans une partie de la chambre.

Mais j’en fus pour mes frais de curiosité : ma grand’mère me tournait le dos.

Je l’entendis soupirer, tout en continuant de parler à ses lunettes. Tout à coup elle se leva. Je faillis lâcher prise, car elle ne pouvait manquer de m’apercevoir… Mais