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LES LUNETTES DE GRAND’MAMAN.

plus tard toute l’histoire. J’en suis encore bouleversée. »

Après ces préambules, on aurait eu tort de compter sur mon sommeil. Je ne fis plus un mouvement, mais je me pinçai deux ou trois fois pour me tenir éveillé.

Au bout d’un moment, lorsque la table fut rapprochée du feu et le jeu installé, j’entendis M. Grassay qui demandait de sa voix aigrelette :

« Et votre histoire, ma chère amie ? »

Ce furent alors des chuchotements auxquels je ne comprenais rien du tout. Cela ne faisait pas mon affaire, car je tenais absolument à connaître le jugement porté sur ma conduite.

Je grimpai donc à mon observatoire. De là, quoique ma grand’mère parlât à voix basse, je ne perdis pas un mot.

Lorsqu’elle eut fini :

« Mais c’est un monstre que cet enfant, s’écria Mme Grassay avec indignation.

— Le fait est… » ajouta son mari.

Un monstre, rien que ça ! J’étais furieux. Je fis à ces deux malveillants personnages une de mes grimaces les mieux réussies, et Dieu sait qu’à cette époque mon répertoire était riche et varié.