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MARIA CHAPDELAINE

thiques et des régions intéressantes du pays de Québec. Hémon en a fait la démonstration : la colonisation est un sujet qui se prête à la littérature aussi bien que n’importe quel autre. Au surplus, dans un pays jeune comme le nôtre, pourquoi irions-nous choisir comme héros de romans des décavés de toutes les classes et de tous les mondes, quand nous avons sous les yeux de si beaux exemples d’énergie, de courage et d’endurance ?

Vous vous en souvenez sans doute : quand Louis Hémon ferma la dernière page de son livre, avant de quitter Péribonca, Maria Chapdelaine venait d’opter. Écartant de son esprit les mirages de la vie américaine, elle voulait rester fidèle à la terre de ses morts et poursuivre leur œuvre au pays de Québec. Écoutez-la parler ; écoutez-la exprimer dans un langage d’une éloquente simplicité les sentiments de notre race.

« Nous sommes venus, il y a trois cents ans, et nous sommes restés… Ceux qui nous ont menés ici pourraient revenir parmi nous sans amertume et sans chagrin, car s’il est vrai que nous n’ayons guère appris, assurément nous n’avons rien oublié. Nous avions apporté d’outre mer nos prières et nos chansons : elles sont toujours les mêmes. Nous avions apporté dans nos poitrines le cœur des hommes de notre pays, vaillant et vif, aussi prompt à la pitié qu’au rire, le cœur le plus humain de tous les cœurs humains : il n’a pas changé. Nous avons marqué un plan du continent nouveau, de Gaspé à Montréal, de Saint-Jean d’Iberville à l’Ungava, en disant : Ici toutes les choses que nous avons apportées avec nous, notre culte, notre langue, nos vertus et jusqu’à nos faiblesses deviennent des choses sacrées, intangibles et qui devront demeurer jusqu’à la fin.

« Autour de nous des étrangers sont venus, qu’il nous plaît d’appeler des barbares ; ils ont pris presque


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