sère ; que le père était un homme de probité,
qui avait essuyé beaucoup de malheurs, et qui
en était enfin aux expédients. Je fus sensiblement
touché du chagrin que devait avoir ressenti
cette jeune personne d’être obligée de se
retirer d’une compagnie où tout inspirait la joie,
pour aller s’affliger avec son père et sa mère. Il
est si dur de porter à dix-huit ans l’uniforme de
la tristesse ! Il ne m’en fallut pas davantage pour
concevoir un grand plaisir à les soulager. J’imaginai
enfin les moyens de leur faire tenir six
cents livres, sans qu’ils dussent me soupçonner
de cette attention. Quinze jours se passèrent,
après lesquels m’étant retrouvé avec la même
personne qui m’avait fait leur éloge, je remarquai
qu’elle affectait de m’en parler et me tenait
certains propos qui me firent connaître qu’elle
était au fait des six cents livres. Quelques précautions
que je prisse pour déguiser le plaisir
que je ressentais au détail qu’elle me faisait du
secours dont leur avait été cet argent, elle me
soupçonna, fit quelques perquisitions, et crut
bientôt n’avoir plus lieu de douter qu’il ne vînt
de moi. Elle s’en expliqua avec madame…,
qu’elle assura être sûre de son fait ; de sorte que
peu de jours après, quoi que je fisse pour m’en
défendre, on voulut me remercier. Il fallut me
rendre chez eux ; cela me donna occasion de me
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LES ÉGAREMENTS