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LES ÉGAREMENTS


inviolable. Que pourrais-je vous dire pour vous peindre l’excès de ma passion ! rien en comparaison de ce que je voudrais pouvoir faire. Ah ! que votre cœur juge de mes sentiments par les siens, je cherche, mais inutilement, les moyens de vous voir et de vous entendre : il n’y a que vous qui puissiez m’apprendre ceux de vous prouver combien je vous aime. Je n’ose rien entreprendre sans votre consentement ; je frémis à la seule idée de vous perdre : notre sort dépend de vous seule, vous me trouverez prêt à tout entreprendre pour faire cesser une aussi affreuse gêne. Quoiqu’à l’avenir j’aie à espérer, mon âge ne me laisse encore disposer de rien, et je dépends d’un bourru d’oncle qui me tient comme en tutelle. J’attends demain quelque expédient de votre part pour vous voir, et suis, en vous embrassant mille fois, votre cher et fidèle, sieur Valérie. »

Je laisse à juger de l’état de mon cœur à la lecture de cette lettre. Je la lus et relus et la baisai mille fois : elle me fit ressentir au vrai le bonheur d’être aimée. Ce fut un degré de plaisir qui m’était nouveau : tout m’y paraissait passionné. Qu’il est doux, me disais-je à moi-même, de régner sur un cœur, d’en régler les mouvements, de le captiver entièrement, d’y trouver le retour des sentiments qu’il nous ins-