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Page:Perrinjaquet - Corée et Japon, annexion de la Corée au Japon, traité du 22 août 1910 et ses conséquences.pdf/14

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extérieures et intérieures ; il se trouvait complètement réduit au rôle d’agent subordonné. Le gouvernement coréen cessait d’être une personnalité internationale indépendante et la souveraineté coréenne se trouvait entièrement anéantie. On peut affirmer que, dès lors, la Corée avait disparu de la société internationale, ayant été absorbée par le Japon. Les puissances ne s’y trompèrent pas et, acceptant le fait accompli, elles retirèrent leurs agents diplomatiques de Séoul en décembre 1905 et janvier 1906[1]. L’annexion de la Corée au Japon était désormais complète, quoique opérée sous une forme déguisée[2]. L’Empereur de Corée n’était plus qu’un monarque honoris causa, comme l’Empereur d’Annam ou le Roi du Cambodge, un Souverain fantôme sans pouvoir et sans force ; ce n’était plus qu’un pensionné du Japon, qui se chargea sans retard de le lui prouver.

L’application du traité du 17 novembre 1905 ne devait pas tarder d’ailleurs à en montrer toute la portée. Dans les premiers mois de 1906, le Marquis Ito, le grand homme d’État japonais, envoyé par le Mikado, s’installa à Séoul appuyé par un corps d’occupation. Il s’efforça de réorganiser les services publics, édicta des règlements nouveaux et traita les Coréens en sujets du Japon. Ceux-ci, peu habitués à supporter une autorité effective et froissés des procédés un peu rudes des agents japonais, essayèrent de résister aux conquérants. Des troubles sérieux éclatèrent en mai-juin 1906, mais les Japonais ne se laissèrent pas surprendre et réprimèrent avec énergie les tentatives d’émancipation des malheureux Coréens, qui furent traités en rebelles et rigoureusement châtiés. L’attitude des Japonais provoqua un nouveau mouvement insurrectionnel au mois de juin 1907, qui n’eut pas plus de succès que le précédent. Mais la menace d’une répression impitoyable n’empêcha pas les attentats isolés contre les agents nippons, ni les complots contre le résident général[3]. L’Empereur de Corée, n’ayant pas voulu se prêter au rôle d’agent subordonné du Japon et ayant essayé de faire montre d’indépendance, fut déposé sur un ordre venu de Tokio, sous l’apparence mensongère d’une abdication volontaire (19 juillet 1907)[4]. De nouveaux désordres s’ensuivirent, le peuple ayant deviné la vérité qu’on cherchait à lui cacher. Les Japonais proclamèrent comme Empereur le fils de celui qu’ils avaient détrôné, mais en prenant de nouvelles précautions contre toute velléité d’indépendance de sa part. Un prétendu traité

  1. V. Courant, Annales des sciences politiques, 1906, p. 789 et suiv.
  2. V. Perrinjaquet, op. cit., dans la Revue générale de droit international public, t. XVI (1909), p. 327.
  3. M. Ito, victime de la vengeance d’un Coréen patriote, fut assassiné à Kharbine au printemps de 1910.
  4. V. Courant, Annales des sciences politiques, 1907, p. 830 et suiv.