— Ah ça ! êtes-vous un petit débutant arrivant de son trou de province ?
L’autre essaya de le dévisager avec assurance.
— Je ne le pense pas.
Sallus haussa les épaules.
— Alors, quelle comédie me jouez-vous ?
Robert jeta la voix tremblante.
— Ma foi, c’est ce que je vous demanderais bien, à vous !…
Sallus continua, sans paraître l’avoir entendu :
— Vous prétendez ne me remettre la pièce qu’en septembre ?… Alors que c’est tout de suite qu’il me faut la faire accepter. Êtes-vous un auteur dont on attend l’œuvre, à qui l’on réserve sa place dans la saison ?… Ignorez-vous que pour nous faire une place, il faut que je jette bas deux ou trois combinaisons, que j’écarte cinq ou six auteurs qui ont infiniment plus de talent que vous et des crocs presque aussi acérés que les miens !
Et, soudain, brutal :
— Allons, assez de plaisanteries !… Si dans quinze jours… vous m’entendez bien quinze jours !… je n’ai pas sur ma table le manuscrit complet de votre pièce sur le divorce, vous êtes prévenu que toutes nos conventions sont rompues. Pour le second drame, vous me l’apporterez à Ostende, fin août… Nous bâclerons l’affaire avec Sennet, qui sera chez sa maîtresse Claire Delion à cette époque, laquelle Claire n’a rien à me refuser et agira ferme en cette occasion.
Très pâle, Robert déclara :
— Écoutez, Sallus, n’essayez pas de m’intimider, c’est inutile !… Je vais me mettre au travail immédiatement… Mais quelque effort que je tente, il m’est impossible de terminer trois actes de cette importance en quinze jours, et même en un mois !…