Cady s’esquiva et rejoignit Mlle Armande.
— Vite, filons, s’écria-t-elle. Nous allons prendre le thé quelque part, je meurs de faim !
Mlle Lavernière avisa le bracelet.
— Où avez-vous pris cela ?
Cady répondit, innocente :
— Je l’ai acheté quarante sous. Et comme je voudrais le porter, vous seriez bien gentille de dire à maman que vous me l’avez donné, pas ?… Ce sera une vieillerie que vous aurez retrouvée dans vos affaires…
XVIII
La représentation du cirque de la place Blanche touchait à sa fin. Les derniers artistes se retirèrent et le public commença à se déplacer tumultueusement pour la séance de cinématographe qui terminait le spectacle.
Cady se leva, agacée.
— Filons ! pas de cinéma, c’est rasant !
Sur la place Blanche, dans la nuit de laquelle se croisaient les feux de l’illumination des cafés, le lent tournoiement hallucinant du Moulin flamboyant, le va-et-vient incessant des autos, Mlle Armande, suprêmement dépaysée et ahurie, implora :
— Nous rentrons, n’est-ce pas, Cady ?
Elle était lasse ; un besoin provincial de sommeil piquait ses paupières.
Mais la fillette, les yeux enfiévrés, secoua la tête.
— Pas encore !… Il faut souper, j’ai très faim.
Elles n’avaient pas dîné, l’estomac mal rempli par du thé, des sandwiches et des gâteaux.
Mlle Armande s’effara.
— Souper ?… Où cela ? Pas ici, toujours…