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Bible (écrite vers 1224), énumère ceux qui avaient été, au temps de sa jeunesse, les plus illustres et les plus généreux protecteurs de la poésie ; ce sont (nous les citons dans l’ordre même où il les place) : l’empereur d’Allemagne Frédéric (Ier), le roi de France Louis (VII), le roi Henri (II) d’Angleterre, le jeune roi (Henri Court-Mantel), le roi Richard (Cœur de Lion), les comtes Geoffroi de Bretagne, Henri (Ier) de Champagne, Thibaut (V) de Blois, Renaud de Mousson (Renaud II de Bar), Philippe de Flandre, Othon (Ier) de Bourgogne, le roi d’Aragon (Pierre II), le grand duc de Lorraine (Thibaut Ier), le seigneur d’Oisi, ceux de Brienne, le comte Henri (Ier) de Bar, etc. Parmi tous ces personnages, quelques-uns mentionnés dans des envois de chansons courtoises, peuvent être à coup sûr considérés comme protecteurs du genre nouveau : tels sont Geoffroi de Bretagne et Thibaut de Blois cités par Gace Brulé, Philippe de Flandre et Henri de Bar par Gautier d’Espinau, Othon de Bourgogne par Gontier de Soignies.

Les noms d’un certain nombre d’autres princes, contemporains des précédents ou un peu postérieurs à eux, apparaissent fréquemment aussi dans les plus anciennes chansons imitées des troubadours : ce sont ceux d’un comte de Ponthieu (Gui, tuteur de Guillaume III à partir de 1191) dans Gace Brulé, d’un comte de Mâcon (Guillaume V, 1185-1224) dans Guiot de Dijon, d’un comte de Gueldre (Othon III, de 1183 à 1206 ou 1209) et d’un comte de Brienne (Erart, mort en 1190) dans des pièces anonymes.

On voit que ces personnages appartiennent à des contrées fort diverses, mais surtout aux provinces du Nord, de l’Est et du Nord-Est, exceptionnellement seulement à celles de l’Ouest et du Sud-Ouest. Si nous considérons, non plus la patrie des premiers protecteurs des poètes courtois, mais celle de ceux-ci même, nous sommes amenés à la même constatation. Nous trouvons parmi eux des Picards, des Artésiens, des Flamands (Conon de Béthune, Blondel de Nesle, Gautier de Dargies, Gontier de Soignies), des Lorrains (Gautier d’Espinau), des Champenois (Chrétien de Troyes, Gace Brulé, Aubouin de Sézanne), des Bourguignons (Hugues de Berzé, Guiot de Dijon), des Franciens (le châtelain de Couci). Au contraire les poètes, originaires