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DE SAINT LOYS.

si laide mezellerie n’est, comme de estre en peché mortel ; et l’ame, qui y est, est semblable au deable d’enfer. Parquoy nulle si laide mezellerie ne peut estre. Et bien est vray, fist-il. Car quand l’omme est mort, il est sane[1] et guery de sa mezellerie corporelle. Mais quand l’omme, qui a fait pechié mortel, meurt, il ne sçet pas, ny n’est certain qu’il ait en sa vie eu telle repentence, que Dieu lui vueille pardonner. Parquoy grant paours[2] doit-il avoir, que celle mezellerie de pechié lui dure longuement, et tant que Dieu sera en paradis. Pourtant vous prie, fist-il, que pour l’amour de Dieu premier, puis pour l’amour de moy, vous retiengnez ce dit en vostre cueur : et que vous aimez beaucoup mieulx, que mezellerie et autres maulx et meschiefs vous viensissent au corps, que commettre en vostre ame un seul pechié mortel, qui est si infame mezellerie. »

Aussi illeques[3] me enquist, si je lavoye les piez aux pouvres le jour du jeudi saint. Et je lui dis : « Fy, fy en malheur ; ja les piedz de ces vilains ne laveray-je mie. Vraiement, fist-il, c’est très-maldit. Car vous ne devez mie avoir en desdaing ce que Dieu fist pour noustre enseignement. Car lui, qui estoit le maistre et Seigneur, lava ledit jour d’icelui jeudi saint les piedz de tous ses apoustres, et leur dist que ainsi que lui qui estoit leur maistre, leur avoit fait, que semblablement ilz fissent les ungs aux autres. Ainsi donques vous prie, que pour l’amour de luy premier, et de moy, le vueillez acoustumer

  1. Sane : sain.
  2. Paours : peur.
  3. Illeques : dans ce moment, ici, là.