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DU RÈGNE DE SAINT LOUIS


Thibaut, qui différoit toujours son départ pour la croisade, vint à la cour de France pour ratifier le traité qu’il avoit conclu. Ce prince y avoit beaucoup d’ennemis. On l’accusoit toujours d’avoir empoisonné le roi Louis VIII et le comte de Boulogne. Sa passion pour la reine Blanche, qui paroissoit la principale cause de son voyage, le rendoit, suivant le jugement qu’on en portoit, odieux ou ridicule. Robert, le plus âgé des jeunes frères du Roi, dont le caractère n’étoit pas exempt d’étourderie et de légèreté, recueillit avidement toutes ces préventions, et fit au roi de Navarre un affront public. Les domestiques de ce prince coupèrent la queue du cheval de Thibaut, et attachèrent, sans qu’il s’en aperçût, des haillons à ses habits. Le Roi, très-irrité de l’outrage fait à une tête couronnée, condamna ces malheureux à mort ; mais Robert les défendit généreusement, s’avoua seul coupable, obtint leur grâce, et fit des excuses au roi de Navarre. Cette leçon n’empêcha point Thibaut d’entretenir Blanche de son amour, toutes les fois qu’il en trouva l’occasion. Ses importunités la forcèrent à le renvoyer de la cour. Alors il composa des vers très-connus, où il reconnoît qu’il est justement châtié par sa dame, où il déclare que, puisque cette dame l’en prie, il partira ; où enfin il semble tirer de cette rigueur de nouveaux motifs pour persister dans son inclination.

Malgré les précautions prises par Blanche pour maintenir la paix dans le comté de Toulouse, la guerre civile alloit s’y rallumer, si la sagesse de Louis n’en eût étouffé les premières étincelles. Un tribunal ecclésiastique avoit été, comme on l’a vu, établi à