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TABLEAU

tumée. Il pressa les cardinaux de procéder sans crainte à l’élection, et leur promit sa protection contre Frédéric. « Nous ne craignons, leur écrivoit-il, ni sa haine, ni ses artifices ; et nous blâmons sa conduite parce qu’il semble vouloir en même temps être empereur et pape. »

Frédéric, craignant l’effet des menaces d’un prince dont il connoissoit la fermeté, mit enfin les cardinaux en liberté. Ils se réunirent dans la petite ville d’Agnani, où ils nommèrent, le 24 juin 1242, Sinibal, Génois de l’illustre maison de Fiesque, qui prit le nom d’Innocent IV. Sinibal avoit blâmé les emportemens de Grégoire IX : il s’étoit montré partisan des voies de modération et de douceur, et son élection devoit être fort agréable à l’Empereur. Celui-ci n’en témoigna cependant aucune satisfaction : « Je ne ferai, dit-il, que perdre l’amitié d’un cardinal, et m’attirer la haine d’un pape. » Mot qui révèle les projets gigantesques auxquels il étoit loin d’avoir renoncé.

Il envoya néanmoins près du nouveau pontife Pierre Desvignes, son chancelier, et Tadée de Sesse, l’un de ses conseillers les plus habiles. Innocent IV offrit, de la part de l’Église, de donner toute satisfaction à Frédéric s’il avoit éprouvé quelque dommage, et demanda, dans cette affaire, l’arbitrage des princes chrétiens. Ces propositions furent éludées, et l’année suivante, Louis, dont le Pape avoit invoqué la médiation, chargea le comte de Toulouse de négocier la paix. Frédéric parut la vouloir sincèrement : il y eut même un traité favorable à la Cour de Rome. Mais bientôt Frédéric, peu fidèle à tenir ses promesses les plus sacrées, refusa d’exécuter le traité, tâcha de