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SUR DU GUESCLIN.

de ses gens de s’aller présenter aux barrieres pour faire à ce prince une proposition qui luy devoit être fort agreable et fort avantageuse, puis qu’il étoit perdu sans ressource. Cet homme se coula jusques sous les murailles de la place, et fit signe de son chapeau qu’il avoit à parler au roy Pierre.

Ce malheureux prince ne pouvant s’imaginer que, dans l’état où étoient les choses, Henry voulût avoir pour luy la moindre indulgence, regarda ce message comme un piege qu’on luy tendoit, et se persuada qu’il ne se faisoit que pour apprendre au vray s’il étoit dans la place en personne. C’est ce qui le fit resoudre à se faire celer, commandant que l’on répondît qu’il y avoit longtemps qu’il en étoit sorty : car il se promettoit sur ce pied que les assiegeans le croyans dehors, leveroient le piquet de devant ce château pour le chercher ailleurs, et qu’il pouroit par là s’évader ensuite à coup sûr. En effet, le commandant vint parler au trompette pour l’assurer qu’il y avoit plus de douze jours que le roy Pierre étoit party pour aller chercher du secours, pretendant revenir bientôt sur ses pas avec de si grandes forces, que les assiegeans seroient trop foibles pour luy résister. Cette nouvelle étoit assez plausible pour y ajoûter foy. Henry la croyant véritable, en tomba dans un grand chagrin, craignant d’avoir manqué le plus beau coup du monde, et dont l’occasion ne se pouroit de longtemps recouvrer. Le comte d’Aine comptant là dessus, luy conseilla de lever le siege. Mais Bertrand opina bien plus juste et plus judicieusement, quand il luy dit qu’il étoit persuadé que Pierre étoit encore là dedans, et que comme il apprehendoit de tomber vif entre ses mains, il