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ANCIENS MÉMOIRES

et le rassembler. Il ne trouva pas plus de cinq cens hommes qui l’avoient suivy : mais jettant les yeux plus loin, il apperçut sur une chaussée beaucoup d’autres troupes qui filoient et le venoient joindre. Cette découverte releva ses esperances, et l’engagea d’exhorter ses gens à reprendre cœur en leur representant qu’ils alloient tomber sur les Anglois, qui seroient surpris, et ne s’attendoient pas à cette irruption ; qu’il ne s’agissoit seulement que de faire un peu bonne contenance pour vaincre des ennemis, que leur seule présence alloit intimider ; que Dieu qui de tout temps avoit été le protecteur des lys, leur inspireroit le courage et les forces dont ils auroient besoin pour triompher de ces étrangers ; qu’ils ne seroient pas les seuls à les attaquer, puis qu’il voyoit déjà paroître Olivier de Clisson, le vicomte de Rohan, le seigneur de Rochefort, Jean de Vienne et le sire de Trye qui vendent avec le maréchal de Blainville, pour les renforcer. Ils étoient tous si mouillez et si fatiguez, et leurs chevaux si recrus et si las, qu’à peine se pouvoient-t’ils soutenir.

Après avoir pris un peu de repos, et s’être sechez au soleil, ils mangerent et burent pour avoir plus de force à combattre, et montans sur leurs chevaux qu’ils avoient aussi fait repaître, ils se dirent adieu l’un à l’autre, frappans leurs poitrines dans le souvenir de leurs déreglemens passez, et recommandans le soin de leurs ames à leur créateur, qu’ils esperoient devoir benir la justice de leurs armes. À peine eurent-fils fait une lieüe, qu’ils virent tout à plain les Anglois dispersez ça et là par les champs, sans tenir aucun ordre ny discipline, et ne songeans point à la visite