Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 21 bis.djvu/531

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se venger d’eux, et de les disgracier un à un, et à des personnes de misérable condition, de médiocre esprit, et de peu de cœur, de machiner la ruine des favoris et de la Reine même, dont ils vinrent à bout

En tous ces troubles néanmoins, M. de Villeroy demeura toujours en quelque considération, et, à la mort du maréchal d’Ancre, étant remis en la fonction de sa charge, y servit jusqu’à la fin, bien que non plus avec tant d’autorité qu’il avoit accoutumé, ni avec la première vigueur de son esprit.

Il fut homme de grand jugement, non aidé d’aucunes lettres, et ne les aimoit pas parce qu’il ne les connoissoit pas, et présumoit beaucoup de soi, ne considérant pas qu’il n’avoit atteint que par une longue expérience la connoissance qu’il avoit, que les lettres, par un chemin abrégé, lui eussent donnée et plus parfaite et plus facilement. Il cachoit néanmoins avec artifice ce défaut par son peu de paroles, qui aida beaucoup à lui donner la réputation qu’il acquit ; car, ne parlant dans le conseil que par monosyllabes, il donnoit plutôt lieu de dire qu’il ne se montroit pas être savant, que non pas qu’il parût être destitué de savoir. Il étoit timide de son naturel et par la nourriture qu’il avoit eue dans la cour en des temps èsquels la foiblesse de l’autorité royale, dans les divisions des troubles de la religion et de la ligue, interrompit le cours de la générosité ordinaire des conseils de cette monarchie. Il fut estimé sincère et homme de parole, laquelle il donnoit aussi très-difficilement. Plus mémoratif des injures que des obligations auxquelles il avoit peu d’égard, jaloux et soupçonneux, mais qui eut toujours les mains nettes, et après cinquante-un