Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 21 bis.djvu/610

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populaires, la grandeur et l’autorité est le plus souvent dommageable à celui qui la possède, et nourrit d’ordinaire son propre malheur, d’autant que, comme ils ne reçoivent leurs charges qu’en faisant la cour au peuple, l’envie de ceux qui les ont données les soulève contre eux, et ce avec tant d’iniquité qu’ils ne sont pas contens de les abaisser et les remettre dans l’état auquel ils étoient quand ils les ont élevés en la magistrature ; mais, usant cruellement de la puissance qu’ils ont, ils les condamnent aux peines les plus grièves qu’ils peuvent, dès que la mauvaise fortune leur en présente l’occasion. Les obligations qu’ils avoient au Roi furent peu considérées par eux, dont le prince Maurice fut la principale cause, d’autant que, cette querelle étant, en quelque manière, particulière entre lui et Barneveldt, il se sentit offensé que le Roi entreprît sa défense.

Messieurs de Luynes, qui gouvernoient, eurent peu d’égard à ce mauvais procédé, ne pensant qu’à se conserver en leur particulier, et tenir, par tous les artifices qu’ils pouvoient, la Reine éloignée, de peur que la splendeur de Sa Majesté n’obscurcît la fausse lumière dont ils éclatoient à la cour.

Quoique toutes leurs actions lui donnassent lieu de douter de la sincérité des promesses qu’ils lui faisoient, elle ferme les yeux à ses justes pensées, et attribue la chaleur de ces cendres au feu qui y avoit été un peu auparavant, et qu’elle veut croire qui n’y est plus, et ainsi elle me commande de m’avancer vers Tours pour préparer son entrevue avec le Roi, où je ne manquai pas d’assurer le sieur de Luynes que, pour conserver la bienveillance de la Reine,