Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 37.djvu/66

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que mademoiselle de Beaumont, le commandeur de Jars, ma sœur et moi sortîmes pour nous retirer. Dans ce moment il arriva que madame de Hautefort, toujours occupée à bien faire, en déchaussant la Reine appuya la recommandation d’une de ses femmes qui partait en faveur d’un vieux gentilhomme servant qui depuis long-temps étoit son domestique, et qui lui demandoit quelque grâce : et madame de Hautefort ne trouvant pas dans la Reine trop bonne volonté pour lui, elle lui dit et lui fit entendre par des souris dédaigneux qu’il ne falloit pas oublier ses anciens domestiques. La Reine, qui n’attendoit qu’une occasion pour se défaire d’elle, contre sa douceur ordinaire ne manqua pas de prendre feu là-dessus, et lui dit avec chagrin qu’enfin elle étoit lasse de ses réprimandes, et qu’elle étoit fort mal satisfaite de la manière dont elle vivoit avec elle. En prononçant ces importantes paroles, elle se jeta dans son lit, et lui commanda de fermer son rideau, et de ne lui plus parler de rien. Madame de Hautefort, étonnée de ce coup de foudre, se jeta à genoux, et, joignant les mains, appela Dieu à témoin de son innocence et de la sincérité de ses intentions, protestant à la Reine qu’elle croyoit n’avoir jamais manqué à son service ni à ce qu’elle lui devoit. Elle s’en alla ensuite dans sa chambre, sensiblement touchée de cette aventure, et je puis dire fort affligée. Le lendemain, la Reine lui envoya dire de sortir d’auprès d’elle, et d’emmener avec elle mademoiselle d’Escars sa sœur, qui avoit toujours été avec elle.

Je ne fus jamais plus étonnée que le matin, quand je sus à mon réveil ce qui étoit arrivé à madame de