Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 37.djvu/67

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Hautefort en ce peu de temps que nous l’avions laissée auprès de la Reine, et qui avoit causé de si grands effets contre elle. On doit dire, par justice et pour sa défense, que ses bonnes intentions la rendoient excusable ; mais les meilleures choses sont presque égales aux pires quand elles ne sont pas bien conduites, et la vertu prise de travers peut quelquefois causer autant de mal que son contraire. Comme j’estimois la sienne, quoique j’en visse l’imprudence, je l’allai voir dans sa chambre, où elle me parut assez forte dans ce moment sur son malheur, si ce peut être un malheur que de quitter la cour. Après une conversation d’une demi-heure, où elle se justifia à moi du mieux qu’elle put, je fus trouver la Reine, à qui je dis la visite que je venois de faire, en excusant cette dame avec le plus de soin qu’il me fut possible. La Reine me fit l’honneur de me dire que j’avois tort de ne pas entrer dans les justes raisons qu’elle avoit de se plaindre d’elle ; que je ne la connoissois presque pas, et que déjà ma bonté alloit l’excuser, quoique je dusse bien voir qu’elle n’avoit point de raisons. Outre les plaintes qu’elle me fit alors, elle dit encore à Beringhen qu’elle avoit senti de la peine de me voir si légèrement engagée dans l’amitié de madame de Hautefort, moi qui n’étois de retour à la cour que depuis peu, et qui n’y devois pas avoir de meilleure amie qu’elle. Cette plainte étoit obligeante, venant d’une grande Reine qui certainement étoit la personne du monde à qui je devois le plus, et que j’aimois aussi le plus véritablement ; mais le cœur ne se voyant pas, la Reine fut quelque temps un peu froide pour moi. Ma conduite me fit beaucoup de tort auprès du mi-