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[1650] MÉMOIRES

combien le premier président étoit bien intentionné pour les princes : car M. de Rhodes, grand maître des cérémonies, étant venu commander au parlement, de la part du Roi, de se trouver le lendemain à Notre-Dame au Te Deum de la victoire, le premier président se servit naturellement de cette occasion pour faire qu’il n’y eût que peu de gens qui opinassent dans un temps où il voyoit bien que personne n’opineroit apparemment que foiblement. Il n’y eut en effet que quinze ou seize conseillers qui parlassent. Le premier président ayant trouvé moyen de consumer le temps, ils allèrent pour la plupart aux remontrances pour la liberté des princes, mais simplement, timidement, sans chaleur, et sans parler contre le Mazarin. Il n’y eut que Menardeau-Champré qui le nomma, mais avec des éloges, en lui donnant tout l’honneur de la bataille de Rethel, et disant, comme il étoit vrai, qu’il avoit forcé le maréchal Du Plessis à la donner. Il avança encore que la compagnie ne pouvoit mieux faire que de supplier la Reine de remettre les princes à la garde de ce bon et sage ministre, qui en auroit le même soin qu’il avoit eu jusque là de l’État. Ce qui me surprit, c’est que cet homme non-seulement ne fut pas sifflé dans l’assemblée des chambres, mais que même en passant dans la salle où il y avoit une foule innombrable de peuple, il ne s’éleva pas une voix contre lui. Cette circonstance, qui me fit voir le fond de l’abattement du peuple, jointe à tout ce qui me parut l’après-dînée dans la vieille et dans la nouvelle Fronde (celle-ci étoit le parti des princes), me fit prendre la résolution de me déclarer le lendemain pour relever les courages.