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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

Broussel le jour de la sédition ; qu’il l’avoit aussi vu chez M. le coadjuteur ; que le même jour le président Charton avoit crié aux armes ; que Joly avoit dit à l’oreille, à lui Canto, quoiqu’il ne l’eût jamais ni-vu ni connu que cette fois-là, qu’il falloit tuer le prince et la grande barbe[1]. Les autres témoins confirmèrent cette déposition. Comme le procureur général qu’on fit entrer après la lecture des informations, eut pris ses conclusions, qui furent de nous assigner pour être ouïs, M. de Beaufort, M. de Broussel et moi, j’ôtai mon bonnet pour parler ; et le premier président ayant voulu m’en empêcher, en disant que ce n’étoit pas l’ordre, et que je parlerois à mon tour, la sainte cohue des enquêtes s’éleva, et faillit à étouffer le premier président. Voici ce que je dis :

« Je ne crois pas, messieurs, que les siècles passés aient vu des ajournemens personnels donnés à des gens de notre qualité sur des ouï-dire ; mais je crois aussi peu que la postérité puisse ni souffrir ni croire que l’on ait seulement écouté ces ouï-dire de la bouche des plus infâmes scélérats qui soient jamais sortis des cachots. Canto a été condamné à la corde à Pau ; Pichon à la roue au Mans ; Sociande est encore sur vos registres criminels. » (M. l’avocat général Bignon m’avoit envoyé, à deux heures après minuit, ces mémoires.) « Jugez, s’il vous plaît, de leurs témoignages par les étiquettes et par leur profession, qui est d’être des filoux avérés ! Ce n’est pas tout, messieurs, ils ont une autre qualité plus relevée et plus rare ils sont témoins à brevet. Je suis au désespoir que la défense de notre honneur

  1. On designoit ainsi le premier président Molé. (A. E.)