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DU PASSAGE DU RHIN.

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son pont, sa batterie ne servoit qu’à avertir l’armée du prince d’Orange que l’on tâchoit de passer le Rhin. Sur cela je m’offris d’aller reconnoître le passage dont on avoit parlé. On me donna le guide, à qui le cœur manquoit fort souvent, et qu’il falloit rafraichir d’eau-de-vie. Comme je fus arrivé sur le bord, j’entrai dans l’eau assez avant avec mes gens, remarquant seulement bien l’entrée et la sortie. Je vis la première capable de huit à dix hommes de front, et la dernière plate, et propre pour un escadron tout entier. Dans ce temps-là la tour me fit sa décharge à cartouche i mais comme les pièces étoient pointées sur le bord, tous les coups donnèrent dans le rivage, et me passèrent sur la tête. Je sortis de l’eau à l’instant ; et m’en allant pour chercher M. le prince, quej’avois laissé auprès du Roi, je trouvai Sa Majesté seule, et l’assurai que nous passerions infailliblement ou que nous y mourrions à la peine. Le Roi me renvoya à M. le prince pour recevoir ses ordres, et me parut être bien aise de la proposition. Je remarquai là)ë partage des courtisans, quelque peu de mes amis s’Intéressant à mon aventure, et le reste souriant, se parlant à l’oreille et ayant bonne espérance de ce qui m’alloit arriver. Je trouvai M. le prince qui s’étoit avancé à la batterie avec Monsieur. Je lui redis les mêmes choses qu’au Roi, et l’ordre que j’en avois reçu. Il me dit c Attons-nous-envoir ensemble. Il fut suivi par quelques courtisans et des officiers de son armée et par le chemin me repassant tout ce qui en pouvoit arriver, il me dit qu’il craignoit le succès pour moi que c’étoit des choses à tenter avec de la cavalerie polonaise. ou tartare ; mais que d’une part la nouveauté eSraieroit nos cavaliers ; que je ne serois suivi que de peu d’officiers seulement, et que le reste se noieroit, ou ne soutiendroit pas lachargeaes ennemis, car on voyoit leurs vedettes sur te bord. Je n’avois aucune bonne raison à opposer aux siennes, si ce n’est que je serois pris ou tué de l’autre côté, que mes.gens me suivroient qu’entre la haie et la tour il n’yavoit d’espace que pour un escadron, qu’ainsi ma tête pourroit aussi bien renverser la leur, qu’il leur seroit possible de renverser la mienne qu’il voyoit la nécessité de l’action ; que rien de ce qu’il falloit pour faire son pont n’était arrivé ; qu’il n’avoit que ses méchans bateaux de cuivre, qu’un coup de canon de la tour couleroit à fond sans remède que