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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 63.djvu/323

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MÉMOIRES

dessus de ceux qu’ils avoient eus en France, afin que le premier pas qu’ils faisoient dans son service leur parût déjà un commencement d’élévation. Il ne négligea pas même ceux qui n’étoient pas encore en état de porter les armes, et forma en Hollande des compagnies de cadets ; il mit dans ses gardes L’Étang, qui, après avoir été à M. de Turenne, avoit eu un régiment de cavalerie ; il fit des gratifications à La Melonière, qui avoit été brigadier en France ; à Coulon, ingénieur ; à La Caillemotte, fils de Ruvigny ; à Miremont, et à beaucoup d’autres, toujours dans la pensée de se fortifier contre la France, et d’avancer ses desseins sur l’Angleterre.

Me voici arrivé à une affaire où l’on me pardonnera bien si je m’étends plus que de coutume : c’est l’affaire de Siam. Elle m’a passé par les mains : je marquerai beaucoup de petites particularités fort ignorées du public ; je tâcherai même de ne rien dire de ce qui est dans mon journal. Je proteste que j’y ai toujours dit vrai, mais que je n’ai pas toujours dit tout ce que je savois. Or dans ces Mémoires-ci je ne garderai point de mesures, et dirai tout sans déguisement.

J’étois tranquille dans le séminaire des Missions étrangères, lorsque Bergeret, premier commis de M. de Croissy, et mon ancien ami, m’y vint voir. Il me conta dans la conversation qu’il étoit venu des mandarins indiens, et qu’on parloit d’envoyer un ambassadeur au roi de Siam, pour lui proposer de se faire chrétien ; qu’il y avoit beaucoup de disposition, et que c’étoit là un emploi digne d’un ecclésiastique habile et zélé. Il me dit de plus qu’il me conseilloit d’y songer, et que si cela dépendoit de M. de Croissy,