Page:Petrarque - Les Rimes de.djvu/305

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Son esprit étant déjà séparé d’elle, ce que les sots appellent mourir était comme un doux sommeil dans ses beaux yeux.

La Mort semblait belle sur son beau visage.

CHAPITRE II.

Le poète raconte comment dans un songe, il lui sembla voir Laure qui le consolait de la douleur que sa mort lui avait causée, et comment il s’entretint avec elle.

La nuit qui suivit l’horrible événement qui éteignit pour moi le soleil, ou pour mieux dire le replaça dans le ciel, d’où je suis resté ici-bas comme un homme aveugle,

Épanchait dans l’air sa douce fraîcheur estivale, en même temps que la blanche amie de Tithon a coutume de soulever le voile des songes confus,

Quand une dame, ressemblant à la saison, et couronnée de pierreries orientales, vint vers moi du milieu de mille autres femmes couronnées comme elle.

Parlant et soupirant, elle me tendit cette main tant de fois désirée ; et j’en ressentis au cœur une douceur éternelle.

« — Reconnais celle qui détourna tes pas des sentiers vulgaires, dès que ton cœur gentil se fut aperçu d’elle. — »

Puis, pensive, d’un air humble et sage, elle s’assit et me fit asseoir sur une rive qu’ombrageaient un beau laurier et un hêtre.

« — Comment ne reconnaîtrais-je pas mon âme, ma Déesse ? — » répondis-je comme un homme qui parle et pleure. « — Mais dis-moi, je te prie, si tu es morte ou vivante. — »