Page:Petrarque - Les Rimes de.djvu/330

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vos folles sornettes, et mesurez-vous largement le temps, car un mal prévu cause une douleur moindre.

Peut-être je prodigue en vain mes paroles, mais je vous avertis que vous êtes affligés d’une grave et mortifère léthargie.

Car les heures volent, et les jours, et les ans, et les mois ; et tous nous avons, à des intervalles fort courts, à chercher d’autres pays.

Ne faites pas au cœur un calus contre la vérité, comme vous en avez l’habitude ; ouvrez au contraire les yeux, pendant que vous pouvez amender votre erreur.

N’attendez pas que la Mort frappe, comme font la plupart, car le nombre des sots est certes infini.

Quand j’eus vu bien clairement le vol et la fuite de la grande planète, qui m’ont causé tant de tourments et d’erreurs,

J’aperçus des gens qui s’en allaient tranquillement sans crainte du Temps ni de sa rage, étant sous la garde de quelque historien ou de quelque poète.

Il semble que l’envie s’acharne plus sur eux que sur d’autres, car eux-mêmes ils ont pris leur vol hors de la commune cage.

C’est contre eux que celui qui seul brille s’apprêtait à faire le plus d’efforts, et redoublait la vitesse de son vol.

Il avait doublé l’avoine à ses coursiers ; et la reine dont j’ai parlé plus haut voulait déjà se séparer de quelques-uns des siens.

J’entendis dire — je ne sais par qui, mais ce qui fut dit, je l’écrivis — « — contre ces hommes, qui sont à proprement parler de frêles plantes, abîmes obscurs d’aveugle oubli,