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Page:Peyrebrune - Gatienne.djvu/112

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gatienne

élever l’enfant ; et de leur fortune, deux cent mille francs, déposée en rentes sur l’État ; et des mille soucis de sa jeunesse qui l’avaient mûri trop vite peut-être ; car, à trente ans, il éprouvait les désespérances de l’homme dont la vie est finie. Cependant il n’avait point vécu ; sa jeune paternité détournait de lui les passions qui usent. Gatienne était son premier amour.

Il n’eût jamais aimé s’il ne l’eût pas aimée. Mais elle l’avait pris tout entier, avec tous les besoins de son être, avec toutes les tendresses passionnées de son esprit et de son cœur. Il ne pouvait plus vivre que par elle et pour elle. Si elle le repoussait, c’était fini…

On n’entendait plus rien dans la pièce à côté.

Depuis un instant, Clotilde avait attiré Gatienne à l’entrée du salon, et, la tenant par les deux mains, résolument, la contraignait d’écouter.

Comme pour fuir, la jeune fille rejetait son buste en arrière ; mais, appuyée de l’épaule au chambranle, elle s’y soutenait défaillante.

Les paroles qu’elle entendait l’écrasaient peu à peu. Elle se sentait fléchir. Ses volontés rudes s’émiettaient. Elle fit un effort cependant pour se