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Page:Peyrebrune - Gatienne.djvu/117

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gatienne

comme jamais « la fière créole » n’en offrit à sa clientèle du noble faubourg. La robe de noce était brodée à la main, satin sur faille pour le tablier, et la traîne en brocart, garnie de points d’Alençon.

La parure d’oranger, en fleurs naturelles, devait arriver de Nice le matin de la cérémonie.

Ces préparatifs ne durèrent que quinze jours ; mais il était temps que cela finît. La fièvre les tenait, grand’mère et Fabrice ; elle lui disait en riant :

— Nous nous ruinerons.

Au reste, tout cela marcha si vite, dans un tel tourbillon d’allées et de venues, de va-et-vient des marchands et des ouvriers, que Gatienne ne comprit rien à cette frénésie de luxe. Elle vivait, un rêve fantastique, dans les éblouissements du décor qui se préparait.

Elle n’eut le temps ni de se recueillir ni de se souvenir.

Depuis le premier baiser de Fabrice, elle ne s’appartenait plus, une existence nouvelle l’emportait, et elle se laissait aller, si lasse de ses longues luttes passées, qu’il y avait comme un endormement dans son abandon ; et, dans ce sommeil, le rêve brûlant de son amour.