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Page:Peyrebrune - Gatienne.djvu/156

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gatienne

Elle devrait tromper Fabrice tous les jours de sa vie, dans toutes ses pensées, dans ses troubles, dans ses larmes. Il lui semblait qu’elle l’avilissait, et cependant il ne lui restait que ce choix : le tromper ou le perdre.

Comme à l’heure de son mariage, la lutte recommençait entre sa conscience et sa passion, plus âpre et violente maintenant que toute sa chair criait après la possession éternelle de l’être aimé.

Alors elle se redressait farouche.

— Certes, elle aurait du courage ; son visage de marbre ne trahirait rien ; elle regarderait en face celui qu’elle avait maudit. Qu’importe le dégoût de son cœur et son intime honte ? Fabrice, heureux toujours, lui garderait son ineffable adoration.

Mais, quand Fabrice lui disait :

— Il faut pourtant que nous recevions Robert !

Une faiblesse lui courait par tout le corps, à croire qu’elle allait mourir ; et elle répondait :

— Attendons.

Seule, elle essayait de s’habituer à cette vue ; elle tendait son regard, les dents serrées, et restait des heures immobile, retenant ses frissons, s’étudiant à ne rougir ni pâlir.