Aller au contenu

Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/114

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

voir, partiellement nue, à consentir aux effleurements de sa peau, aux caresses des regards et des souffles sur sa gorge soulevée, offerte, lorsqu’elle a, pendant toute une nuit, régalé ses danseurs des effluves qui montent de son corps moite par les divers entrebâillements du corsage, comme un encens parfois révélateur, elle s’est presque donnée. Il reste si peu d’agrafes à défaire pour que la robe tombe, et si peu de pudeur à vaincre après tant de pudeurs vaincues !

Mais il faut bien se déshabiller comme tout le monde.

J’arrivai de bonne heure chez Mme de Bléry afin de n’avoir pas à entrer seule dans le salon quand ses invités y seraient déjà. Louise, encore à sa toilette, me fit passer dans sa chambre.

Maintes fois, j’y étais venue pour remettre ou poser mon chapeau. Elle était d’une élégance sobre, ordonnée, un peu solennelle, comme j’aime une chambre d’honnête femme. Louise était habillée ; mais elle s’attardait à choisir quelques bijoux, les prenant et les rejetant avec une sorte de nervosité que je ne soupçonnais pas chez elle.

Elle me consultait, puis me raillait, repoussait mon choix et cherchait encore.

Je ne pus m’empêcher de lui dire :

— Qu’as-tu donc ce soir ?

— Moi ? rien. Je me suis butée à la sotte fantaisie d’assortir une parure à la couleur indécise de ma robe, voilà tout. Et rien ne va. C’est énervant !

Entraînée par sa fièvre, j’avais pris un collier très ancien, d’un vieil or vert admirablement ciselé ; et, moi qui n’aime pas les bijoux, je m’approchai, pour essayer celui-ci, d’une glace posée sur une console. Déjà mes mains réunissaient les agrafes derrière mon