Aller au contenu

Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/147

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

pas que la profession d’un homme put avoir une influence sur sa façon de sentir ou de rêver l’amour. On connaît même de mauvais chefs de bureau, de par les ministères, qui sont d’adorables poètes et des amoureux exquis.

Mais Turmal remuait sa tête flambante, exaspéré dans son entêtement.

Et Sylvère du Parclet, fort triste, remporta son roman.

Alors intervint la protection charmante de Guy d’Harssay, près du directeur de la Revue des Universités.

Annoncée, Sylvère se présenta, comme toujours, gauche et timide, son manuscrit caché sous le pan du manteau, honteuse irrésistiblement, de promener ainsi, comme une marchandise à vendre, l’œuvre de ses douleurs, de ses rêves d’artiste, le duvet le plus pur de son âme, plumée vive, ses larmes cristallisées et scintillantes, sa pensée dévoilée, nue comme un marbre.

Et cette œuvre, un homme, qui n’entendait rien aux choses de l’art ni à la magie du verbe, allait la prendre dans ses mains brutales, la fouiller de son regard froid, uniquement chercheur du seul attrait, de l’intérêt au point de vue de la vente.

En déposant craintivement sur le bureau de M. de Labut son lourd manuscrit : Roses d’adieu, Sylvère, tous bas, lui demandait pardon.

Et cependant l’accueil du beau directeur fut absolument aimable.

Très intéressé par cette petite femme effarouchée, qui passait pour avoir du talent et se montrait si embarrassée de sa réputation, il voulut être gracieux, et l’encouragea par des promesses.