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Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/244

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Comme Mme du Parclet n’allait pas au théâtre, ni dans le monde, — elle portait un deuil austère, — il n’avait à l’accompagner nulle part. Cette raison de ne pas la retrouver plus souvent ne venant pas de lui, on ne pouvait lui en faire un grief.

Il gardait des façons d’être courtoises et d’une affectueuse mais calme familiarité. Entre Sylvère et Louise, il partageait ses soins, fraternellement. Cela formait une famille très unie ; mais chacun gardait son intime pensée.

Et des mois s’écoulèrent.

Un jour Mme de Bléry entra chez Sylvère et la surprit couchée sur un divan, la tête très basse.

— Je te dérange : tu dormais ?

— Non ; je travaillais ; mais cela ne fait rien.

— Tu travaillais ?

— Oui ; depuis quelque temps déjà, je suis si lasse, si découragée, que mes forces cérébrales s’anémient. Je suis obligée de ramener le sang au cerveau par un commencement de congestion. Alors, en cette pose…

— Mais tu te fatigues horriblement !

— Oh ! que cela m’inquiète peu !

Louise leva les épaules :

— Comme cela t’avance de te faire du mal !

— C’est meilleur que tu ne penses ; il y a, dans la douleur physique, une volupté, en certains cas.

— Voilà qui te va bien, de parler de volupté, toi !… Ne parle pas des couleurs, ma pauvre aveugle.

Sylvère sourit :

— Myope, seulement.

— Tiens ! aurais-tu trouvé des lunettes ? C’est moi qui bénirais l’inventeur.

— Vraiment ? Peuh ! à quoi cela sert-il, la volupté ?

— A vivre. Ou du moins à trouver à la vie quelque goût, un goût qui te manque.