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Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/254

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un instant, puis reprit son aplomb et continua sa démonstration avec un sérieux parfait. Au-dessus de sa tête s’étalait un tableau noir surmonté d’une carte immense, délicatement rosée, représentant une cervelle humaine coupée en deux, comme un fruit, dont la pulpe striée de légers filets pourpres racontait le ménage intérieur des cellules en l’état de paralysie.

Sylvère, dont une imperceptible émotion précipitait le souffle, paraissait attentive ; plus attentive que José de Meyrac, qui, rejeté un peu en arrière, examinait ardemment le profil triste, les yeux baissés et la nuque élégante et pâle de Sylvère. Plusieurs fois il s’était penché vers elle, pour une observation à voix basse, lui effleurant la joue de sa barbe légère ; elle avait rougi sans répondre. Et Meyrac, très intéressé, lui trouvant une nervosité inconnue, cherchait à en pénétrer les causes.

Enfin, le Dr Pall regarda sa montre, fit un signe, les internes se levèrent. Un mouvement d’intérêt remua les auditeurs, et José dit vivement à Sylvère :

— On va chercher les malades…

Mais elle se dressa aussitôt, et filant légèrement devant lui, murmura :

— Ne vous dérangez pas, je m’en vais.

— Comment, fit-il, lui saisissant la main, très surpris.

— Oui, ce spectacle me répugne.

— Mais c’est le plus curieux !…

— Pas pour moi. Cela me fait mal.

— Oh ! alors…

Il voulut la suivre :

Mais elle, singulièrement impérative :

— Restez !

— Sylvère !