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Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/256

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elle fait une envolée. Et elle chante, horrible !

Des hommes, dans le costume de l’hospice, tous pareils, si dissemblables ! Un érotique paraît, assez calme. Mais on lui parle de la comtesse :

— Vous savez bien, la comtesse ?… Il n’y a pas longtemps que vous l’avez vue ?

Et l’homme s’allume, sa face rougit, il cligne un œil lubrique ; sa bouche s’ouvre et sa langue danse.

Il guérira, celui-ci : on vous apprend que c’est un employé du chemin de fer de telle ligne.

Cet autre est alcoolique : il est perdu. On a devant soi un condamné à mort. Il parle peu, regarde sans comprendre, et quel regard ! Une seule réponse :

— Vous trouvez-vous mieux ?

— C’est la nourriture qui ne me va pas. Toujours de la viande bouillie, pouah !…

On rit.

Ah ! celui-là, on vous le recommande, c’est un inventeur. Il y a beaucoup d’inventeurs atteints de paralysie générale. Un inventeur de Paris port de mer, un adroit artiste, qui a fait, en miniature, une petite ville de Lilliput, ciselée, décorée, un vrai joujou. Et son tracé n’est pas plus bête qu’un autre : seulement il a des idées qui paraissent bizarres. Sait-on ?

Celui qu’on présente maintenant a inventé une machine pour l’utilisation des forces de la nature. Oh ! les grands et doux rêveurs ! Mais il s’attarde, ne veut rien dire, sourit avec finesse. Il ne paraît pas bien certain que les gens qui sont là soient capables de l’apprécier. Il a peut-être raison.

Cependant on le pousse, on l’excite à grimper sur sa chimère, cette chimère qui l’a conduit à Sainte-Anne et que l’on conserve pour ces chevauchées publiques. On lui rappelle les triomphes qu’il croit avoir