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Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/268

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les publications où elle avait eu accès jusqu’ici cette formule courait : « Beaucoup de talent, Mme du Parclet, oh ! certes ! mais, un peu trop osée et hardie en ses thèses pour les Revues et journaux qui s’adressent aux familles, pas assez licencieuse pour les autres. » Et l’on ajoutait : « Trop littéraire pour les petits journaux. »

On l’eût ensevelie dans cette gloire, sans les éditeurs qui protestaient, en publiant jusqu’à ses moindres lignes, en lui faisant signer des traites à longue échéance, payées d’avance ; et, de cela, elle vivait.

Or, la générosité de l’éditeur est la mesure de la faveur publique.

Sylvére avait donc un public.

Mais de Labut souriait, en éfilant le poil roux de sa barbiche fauve, et, parmi les bons camarades, ceux qui n’aiment pas à rencontrer les femmes sur l’honnête terrain du travail élargissaient ce sourire en un ricanement.

Sylvére regarda autour d’elle et constata que parmi les quatre ou cinq femmes qui méritaient le nom d’écrivain, aucune n’était à son rang dans la bataille. Sauf peut-être dans le journalisme, quelques très rares conquérantes, qui s’étaient imposées aux camarades — étant issues de cette camaraderie — et qui aidaient les mâles à garder les portes, ou encore quelques aristocratiques authores occupant la vedette mondaine.

Mais, loin derrière, venait le troupeau des tristes bas-bleus, misérable cohorte qu’un chimérique espoir entraîne sur la voie douloureuse où toujours elle marcha, les pieds dans la boue, sous les huées, les salissures ou les mépris. Car, dans notre égalitaire France, la force brutale prime le droit ; et le jupon, que dans tout pays libre maintenant on respecte, et auquel on