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Page:Peytraud - L'esclavage aux Antilles françaises avant 1789, 1897.djvu/118

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Européens sans autre règle que son caprice. Ainsi, en 1693, il en vendit 3 ou 400. Moreau de Saint-Méry cite un cas original pour lequel on vend les femmes comme esclaves au Dahomey : si une femme, se rendant à l’endroit où l’on détient les captifs, chez Dada, roi des Dahomets, est surprise dans le trajet, soit à l’aller, soit au retour, par l’écoulement menstruel, elle doit le déclarer au roi, et alors elle a la tête tranchée, ou bien elle est vendue comme esclave[1].

Clarkson[2] nous montre, d’après des témoignages authentiques, que le roi de Dahomey vend, quand il lui plaît, les habitants d’un de ses villages. Après avoir indiqué les cas ordinaires pour lesquels les nègres peuvent être vendus comme esclaves, il ajoute que, depuis la traite, on a inventé de nouveaux délits. C’est ainsi que certains rois entretiennent un grand nombre de concubines, les contraignent « de sortir et de chercher à séduire les jeunes gens qui, quand ils cèdent, sont dénoncés par la femme elle-même et deviennent alors esclaves du prince qui en fait sa propriété[3] ». Au rapport d’un négrier, qui fit le commerce d’esclaves pendant dix-huit ans[4], « les princes-nés exercent sur tout homme qui n’est pas leur égal le droit arbitraire de se saisir de sa personne et de le conduire en captivité. Ce droit, s’appelle en français de traite, poigner, et l’on nomme poignage l’action de saisir le nègre que l’on vend. » Barbot raconte[5] que, « sous le plus léger prétexte, sans égard pour le rang ni pour la profession, un roi fait vendre à son gré ses sujets ». Et il cite l’exemple d’un marabout vendu par l’alcade de Rufisque, sur ordre du damel, aux Français de Gorée. Les chances de la guerre firent également qu’il y eut aux Antilles des esclaves « qui étaient de grande qualité dans leur pays ».

  1. Arch., Col., F, 134, p. 362.
  2. Op. cit., 28.
  3. Op. cit., p. 30.
  4. Degrandpré, Voyage à la côte occidentale d’Afrique fait pendant les années 1786 et 1787, 2 in-8o, Paris, 1801, I, 409. — Cf. Walckenaër, XIV, 432.
  5. Cf. Walckenaër, IV, 121.