Page:Peytraud - L'esclavage aux Antilles françaises avant 1789, 1897.djvu/324

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

même défendu d’armer de fusils les nègres gardiens de champs de cannes ou de vivres[1]. Un règlement du Conseil de Léogane[2] porte, à l’article 30, que le prévôt et l’exempt de la maréchaussée visiteront les cases des nègres en présence du maître ou de l’économe ; ils confisqueront toutes les armes, même les machettes, à moins que les esclaves ne soient autorisés par écrit à en avoir. En même temps, les administrateurs de Saint-Domingue promulguent un règlement[3], qui prescrit d’arrêter les nègres assemblés au nombre de 4 après dix heures du soir, ainsi que ceux qui seront trouvés à jouer ou portant des armes ; on les conduira chez leurs maîtres, si ceux-ci sont connus, sinon en prison, où ils recevront 10 coups de fouet (art. 4). — Il est permis d’entrer dans les maisons des nègres et négresses libres pour découvrir les receleurs de vols domestiques (art. 5).

Nous remarquerons une singulière interprétation de l’article 15 du Code Noir, qui défend aux nègres de porter des armes : Un d’eux est condamné à la potence pour tentative de suicide, parce qu’il s’était porté dans le ventre plusieurs coups d’un couteau flamand, alors que son maître voulait le faire châtier pour une faute[4]. Un autre esclave, ayant voulu se tuer, est également condamné à mort, puis seulement au fouet, à la marque et au carcan[5]. En voici un qui, accusé d’avoir voulu se couper la gorge et appelant de sentence de mort, doit subir la peine des galères perpétuelles[6]. Tel qui a voulu se pendre est pendu effectivement[7]. Le gouverneur de la Martinique rapporte à ce propos que le penchant au suicide est fort commun, mais que, généralement, les nègres

  1. Arch. Col., F, 256, p. 493, 7 novembre 1737. Arrêt du Conseil supérieur.
  2. Moreau de Saint-Méry, III, 551, 17 janvier 1739. Autre arrêt analogue du conseil du Cap. Id., ib., 368, 6 août 1739.
  3. Id., ib., 374, 13 août 1739.
  4. Arch. Col., F, 225, p. 617. Arrêt du Conseil supérieur de la Guadeloupe 8 novembre 1740. Cf. F, 257, p. 137, pour un cas analogue.
  5. Arch. Col., Annales de la Martinique, F, 245, p. 539, 13 février 1744.
  6. Arch. Col., F, 258, p. 383, 7 novembre 1748.
  7. Arch. Col., Ann. Martinique, F, 244, p. 663, septembre 1750.