Page:Peytraud - L'esclavage aux Antilles françaises avant 1789, 1897.djvu/444

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sous prétexte qu’elle était née de père et mère libres, sans pouvoir faire la preuve, le subdélégué à l’intendance des îles, Mithon, la déclare esclave et la condamne à un mois de prison, les fers aux pieds. Mais, trois ans plus tard[1], l’intendant la déclare libre, ainsi que ses enfants, et sa maîtresse est déboutée de sa demande. Schœlcher rapporte[2] un arrêt du Conseil du Cap, du 7 février 1770, condamnant un mulâtre, malgré quarante ans de liberté, à redevenir esclave, faute de justifier de sa liberté ; en même temps, son mariage était cassé et ses six enfants déclarés bâtards. Il fallut une ordonnance des administrateurs pour suspendre l’exécution de cet arrêt et lui rendre la liberté.

En réalité, cette question des affranchissements, malgré des prescriptions multiples, ne put jamais être réglée d’une manière satisfaisante. Les restrictions apportées à la volonté des maîtres après le Code Noir ne furent jamais appliquées dans toute leur rigueur, ainsi que le constate encore M. Rouvellat de Cussac à propos de l’ordonnance du 16 septembre 1841[3]. Peut-être y aurait-il eu moyen, en favorisant les affranchissements et en accordant même au besoin des primes, d’arriver graduellement à l’abolition de l’esclavage, une fois que la traite eut été supprimée. Nous nous contentons d’indiquer cette idée, dont le développement et la discussion n’auraient plus qu’un intérêt tout à fait rétrospectif.



IV

La situation nouvelle des affranchis est déterminée aussi nettement que possible par les articles 57, 58 et 59 du Code Noir. Par le premier, ils sont réputés naturels français ; par

  1. Arch. Col., F, 230, p. 305, 25 août 1708.
  2. Col. fr., p. 306. — Cf. Moreau de Saint-Méry, V, 290.
  3. Op. cit., pp. 88 et suiv. Pour les mesures relatives aux affranchissements après 1789, Cf. Trayer, op. cit., p. 85.