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Page:Pfeiffer - Voyage d une femme autour du monde, trad. de Suckau, Hachette, 1859.djvu/50

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turques dont les yeux de feu brillent à travers leur voile ; il voit des Persans avec leurs hauts bonnets ; des Arabes à la noble physionomie ; des derviches coiffés de calottes de fou et vêtus de robes de femmes plissées ; et de temps en temps des voitures couvertes de peintures et de dorures, et traînées par des bœufs magnifiquement harnachés. Ce sont là des spectacles qui dédommagent amplement des choses désagréables qu’on aperçoit çà et là. Dans l’intérieur de Rio-de-Janeiro, au contraire, il n’y a rien qui puisse vous charmer et vous dédommager : on n’a devant les yeux que des objets repoussants.

Ce ne fut qu’après avoir passé quelques semaines ici que je pus m’habituer un peu à la vue des noirs et des mulâtres ; je trouvai même parmi les jeunes négresses quelques jolis visages, et, parmi les Brésiliennes et les Portugaises de couleur un peu foncée, des figures pleines d’expression : le don de la beauté semble plus rare chez les hommes.

L’animation des rues est loin d’être aussi grande qu’on pourrait le supposer d’après les descriptions qu’on en a faites ; elle ne peut pas se comparer à celle des rues de Naples et de Messine. Ceux qui font le plus de bruit, ce sont les portefaix nègres, et surtout ceux d’entre eux qui chargent les sacs de café sur les vaisseaux : un chant monotone leur sert à marcher en mesure et à régler leur pas. Ce chant est fort laid, mais il a l’avantage d’avertir le piéton et de lui laisser le temps de se garer.

Au Brésil, tous les travaux sales et pénibles de la maison ou du dehors sont faits par les noirs, qui représentent en général ici le bas peuple. Beaucoup, cependant, apprennent des métiers, et plusieurs excellent dans leur art au point de pouvoir être comparés aux plus habiles Européens. Je vis dans les ateliers les plus distingués des noirs occupés à confectionner des habits, des souliers, des ouvrages de tapisserie, des broderies d’or et d’argent ; et plus d’une