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Page:Pfeiffer - Voyage d une femme autour du monde, trad. de Suckau, Hachette, 1859.djvu/82

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nous empressâmes d’aller au-devant d’eux : nos blessures saignantes et nos parasols déchirés eurent bientôt expliqué notre situation. Ils nous demandèrent quelle direction le fugitif avait prise, s’élancèrent à bas de leurs chevaux et cherchèrent à le rattraper ; mais leur peine aurait été inutile, s’il n’était venu deux nègres qui leur prêtèrent secours et saisirent bien vite le fugitif. On le lia et, comme il ne voulait pas marcher, on l’accabla de tant de coups, surtout à la tête, que je craignais qu’on ne brisât le crâne du pauvre diable. Mais il ne changea pas de contenance et demeura comme attaché au sol. Il fallut que les deux nègres l’enlevassent ; alors il se mit à mordre autour de lui avec une rage de bête féroce. On le porta ainsi jusqu’à la maison la plus proche. Nous suivîmes nos sauveurs, le comte et moi, et, après avoir fait panser nos blessures, nous continuâmes notre voyage non sans quelque crainte, surtout quand nous rencontrions un ou plusieurs nègres, mais sans nouvel accident, et toujours avec la même admiration pour les beautés du paysage.

La colonie de Pétropolis est située au milieu d’une forêt vierge, à 833 mètres au-dessus de la mer. Il n’y a guère plus de quatorze mois quelle a été fondée, et son but principal est de cultiver pour les besoins de la capitale différentes espèces de fruits et de légumes d’Europe, qui dans les pays tropicaux ne viennent qu’à une hauteur considérable. Une petite rangée de maisons formait déjà une rue, et sur une place défrichée se dressait la charpente d’une plus grande construction : c’était une maison de plaisance de l’empereur ; mais cette résidence ne pouvait avoir que difficilement un aspect impérial, car les portes d’entrée, basses et étroites, faisaient un étrange contraste avec les larges et grandes fenêtres. C’est autour du château que se formera la ville. Cependant il y a beaucoup de huttes isolées, plus loin, dans l’intérieur de la forêt. Une partie des colons, comme les ouvriers, les petits marchands, occupaient de petites