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Page:Pfeiffer - Voyage d une femme autour du monde, trad. de Suckau, Hachette, 1859.djvu/98

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une courte prière on leur donne le souper, qui se compose de fèves cuites au lard, de carna secca et de farine de manioc. Au lever du soleil ils se réunissent, on les compte de nouveau, et après la prière et le déjeuner ils se mettent à l’ouvrage.

Je remarquai dans cette plantation, comme dans d’autres faziendas, vendas et maisons particulières, qu’on ne traite pas les esclaves aussi durement que nous le croyons d’ordinaire en Europe. Bien loin d’être écrasés de travail, ils n’en prennent qu’à leur aise et sont bien nourris. Leurs enfants servent de compagnons aux enfants de leurs maîtres et se chamaillent avec eux comme avec leurs égaux. Il arrive sans doute que des esclaves sont parfois maltraités et châtiés sans l’avoir mérité ; mais ces injustices n’ont-elles pas lieu aussi en Europe ?

Je suis certainement une grande ennemie de l’esclavage, et je saluerais son abolition avec une joie inexprimable. Mais je n’en répète pas moins que l’esclave nègre placé sous l’égide de la loi jouit d’un meilleur sort que le fellah libre d’Égypte et que beaucoup de paysans d’Europe, qui gémissent encore sous le poids de corvées. Ce qui semble surtout contribuer à rendre le sort d’un esclave préférable à celui d’un paysan corvéable, c’est que l’achat et l’entretien du premier sont dispendieux, tandis qu’on ne débourse rien pour le dernier.

La disposition des maisons des maîtres dans les faziendas est extrêmement simple. Les fenêtres n’ont pas de vitres, et sont fermées la nuit par des volets de bois. Souvent le toit sert de couverture commune à toutes les chambres qui ne sont séparées l’une de l’autre que par des cloisons, de sorte qu’on entend distinctement la moindre parole de son voisin et le bruit de la respiration des dormeurs. Les meubles sont très-simples aussi ; ils se composent d’une grande table à manger, de divans de paille tressée et de quelques chaises. Les habits pendent ordinai-