Page:Physiologie du gout, ou meditations de gastronomie transcendante; ouvrage théorique, historique, et à l'ordre du jour, dédié aux gastronomes Parisiens (IA b21525699).pdf/189

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Le plaisir de manger est la sensation actuelle et directe d’un besoin qui se satisfait.

Le plaisir de la table est la sensation réfléchie qui naît de diverses circonstances de faits, de lieux, de choses et de personnes qui accompagnent le repas.

Le plaisir de manger nous est commun avec les animaux ; il ne suppose que la faim et ce qu’il faut pour la satisfaire.

Le plaisir de la table est particulier à l’espèce humaine : il suppose des soins antécédents pour les apprêts du repas, pour le choix du lieu et le rassemblement des convives.

Le plaisir de manger exige, sinon la faim, au moins de l’appétit ; le plaisir de la table est le plus souvent indépendant de l’un et de l’autre.

Ces deux états peuvent toujours s’observer dans nos festins.

Au premier service, et en commençant la session, chacun mange avidement, sans parler, sans faire attention à ce qui peut être dit, et, quel que soit le rang qu’on occupe dans la société, on oublie tout pour n’être qu’un ouvrier de la grande manufacture. Mais quand le besoin commence à être satisfait, la réflexion naît, la conversation s’engage, un autre ordre de choses commence, et celui qui jusque-là était que consommateur devient convive plus ou moins aimable, suivant que le maître de toutes choses lui en a dispensé les moyens.

effets.

74. — Le plaisir de la table ne comporte ni ravissements, ni extases, ni transports, mais il gagne en durée ce qu’il perd en intensité, et se distingue surtout par le privilége particulier dont il jouit, de nous disposer à