MÉDITATION XV
DES HALTES DE CHASSE
77. — De toutes les circonstances de la vie où le manger est compté pour quelque chose, une des plus agréables est sans doute la halte de chasse ; et de tous les entr’actes connus, c’est encore la halte de chasse qui peut le plus se prolonger sans ennui.
Après quelques heures d’exercice, le chasseur le plus vigoureux sent qu’il a besoin de repos ; son visage a été caressé par la brise du matin ; l’adresse ne lui a pas manqué dans l’occasion ; le soleil est près d’atteindre le plus haut de son cours ; le chasseur va donc s’arrêter quelques heures, non par excès de fatigue, mais par cette impulsion d’instinct qui nous avertit que notre activité ne peut pas être indéfinie.
Un ombrage l’attire ; le gazon le reçoit, et le murmure de la source voisine l’invite à y déposer le flacon destiné à le désaltérer[1].
Ainsi placé, il sort avec un plaisir tranquille les petits pains à croûte dorée, dévoile le poulet froid qu’une main amie a placé dans son sac, et pose tout auprès le carré de gruyère ou de roquefort destiné à figurer tout un dessert.
Pendant qu’il se prépare ainsi, le chasseur n’est pas seul ; il est accompagné de l’animal fidèle que le Ciel a
- ↑ J’invite les camarades à préférer le vin blanc ; il résiste mieux au mouvement et à la chaleur, et désaltère plus agréablement.